Mai

Vendredi 2 mai, vers 2h30
Séjour de Louise et François, Aude et 
Mylène ayant finalement renoncé aux charmes lyonnais. Evocation ce soir d’un médecin urgentiste de la clinique, un certains L., infection humanoïde qui concentre les plus éprouvants défauts, à commencer par la crasse corporelle.

Jeudi 8 mai
Journée de détente printanière avec ma BB avant mon séjour parisien, en l’honneur de la soutenance de Shue.
Cette nuit, rêve qui révèlerait mon attachement profond à ma dulcinée : à Paris, pressé comme l’exige le rythme conditionnant, j’en arrive à perdre de vue BB en prenant un RER. L’angoisse de ne pouvoir la joindre, qu’il lui arrive quelque chose, puis le contact téléphonique avec une bouderie de sa part et ma peine en résultant… enfin le réveil. Rassuré lorsque je vois ma belle en cheveux à mes côtés, nue sous la couette !
Deuxième fois que nous pédalons jusqu’au parc de Miribel. La piste cyclable aménagée au bord du Rhône cumule les surfaces et les paysages. Peu d’enclin pour la population qui se dore sur les étendues mi-vertes mi-sablonneuses, mais mon style de vie, l’urbain modeste, me contraint à ces promiscuités, mince désagrément au regard de la sérénité psychologique retrouvée. Au fond de l’étendue, tournée vers les bois qui le bordent, je pourrais, le son coupé, me croire dans un plus isolé endroit.
Visionné ce matin un documentaire sur la
genèse de la fin tragique de Bérégovoy. A le voir si heureux dans son bureau de Premier ministre, entouré de petits-enfants adorables d’innocence, on aurait voulu que ce parcours exemplaire ne s’achevât pas dans la gabegie suicidaire. L’acharnement politico-médiatico-judiciaire aura miné l’ex tourneur-ajusteur (ou fraiseur) qui voulait purger un peu les financements politiques.
23h30. Presque machinalement, je décide de revenir une troisième fois aujourd’hui dans ces pages. J’aurais dû m’abstenir, car rien n’accroche plus mon esprit à cette heure. Eviter le remplissage sans saillance. Les mélodies vivaces de Fréquence Jazz n’ont même pas d’effets catalyseurs pour une plume amorphe qui se répand sans nécessité. La légitimité d’écrire m’abandonnerait-elle ?

Vendredi 9 mai
Le train qui, quelques années plus tôt, berçait le rythme de mes phrases, n’apparaît plus aujourd’hui que comme une antre inspiratrice exceptionnelle. L’événement qui motive mon déplacement : la soutenance demain à 14h30 salle Bourgeac de la Sorbonne, de la thèse sur la place de la langue-culture française en Iran par ma très chère Shue.


L’occasion d’une immersion éphémère dans la Big Lutèce et dans son quartier estudiantin aux nostalgiques accents. La matière juridique, puis littéraire ont retenu mes passages furtifs, et souvent critiques, à Paris I et III. Mon état psychologique et mes engagements affectivo-professionnels minoraient ma facette d’étudiant, jusque dans ces pages. Un peu plus d’allant et d’initiatives dans cet univers fourmillant auraient peut-être modifié ma perception condescendante d’alors. Quelques amitiés en sont tout de même restées : Marie-Pierre C. et Sonia, cette dernière que je dois voir dimanche soir, pour celles qui ont survécu.

Samedi 10 mai
Arrivé hier dans l’appartement de la tante de Shue (quai de Grenelle), je suis accueilli très affectueusement. Ma chère amie me remet un exemplaire de sa lourde thèse en didactologie des langues et des cultures : La langue française en Iran : histoire, situation actuelle et perspectives d’avenir.
Dans les remerciements, après celui classiquement adressé à son directeur de recherche, le professeur Robert Galisson, cette mention : « Mes amis qui n’ont pas cessé de me soutenir durant ces dernières années et plus particulièrement Loïc Decrauze pour son aide précieuse dans la relecture de cette thèse et pour le témoignage de son amitié sincère ». Très touchante attention qui me fait m’approprier un chouia cette étude.
Le soir, invitation, avec sa tante L. et John, au Spoon food & wine, restaurant gastronomique sous la tutelle talentueuse d’Alain Ducasse. L’idée de cette enseigne récente (avec quatre établissements : Paris, Londres, Iles Maurice et Japon) est synthétisée sur leur carton de présentation : « Véritable invitation au voyage. Spoon revendique la liberté culinaire. A chacun de composer son itinéraire en créant un métissage inédit avec des produits et des techniques du monde entier. » La carte propose effectivement une liste de plats avec suggestion des trois éléments constituants (le plat, son assaisonnement et sa garniture) mais le « 1 + 2 + 3 » peut faire l’objet d’une recomposition en piochant parmi tous ceux proposés. Faisant confiance aux harmonies culinaires mitonnées nous découvrons la succulence à enchaînements démultipliés pour les papilles. Ma marmite de légumes frais aux saveurs tourbillonnantes, les Saints-Jacques révélées par l’action gustative combinée d’une sauce enivrante et d’une salade composée de fraîches denrées, le Récré ‘o’ choc et ses quatre minis desserts au chocolat qui obtiennent la fonte jouissive (la fameux « o ») du convive : le parcours culinaire réalisé depuis la rue de Marignan m’a propulsé vers les cimes de l’art gastronomique, avec une mention de satisfecit total pour le Shiraz qui a souligné le voyage en bouche.

Comme toujours, lors de mes venues à Paris, je tente quelques appels aux accointances, plus ou moins entretenues, pour obtenir une éventuelle entrevue qui rafraîchirait le lien. Pour le moins inespéré, je parviens à entendre Karine V., à qui j’avais envoyé tant de messages lors de sa sombre période d’anorexie mentale. Voix posée, détachée, comme si rien d’anormal n’avait entaché l’amorce de notre relation amicale, elle me demande des nouvelles et m’apprend sa merveilleuse situation : elle doit accoucher en juin ! Voilà une résurrection productive. Promesse de se voir lors de sa prochaine venue à Lyon où réside la sœur de son compagnon. Je ne serais pas étonné que cet engagement reste lettre morte, comme les précédentes. Je reste en effet un peu échaudé par les multiples tentatives passées pour maintenir un lien avec elle et qui ont embrassé le néant. Méfiance donc : la personnalité est attractive sans conteste, mais sans fiabilité, sans détermination dans le maintien de rapports humains qui ont pourtant été déclarés bénéfiques. Je me dois aujourd’hui d’être détaché et d’attendre une éventuelle preuve de sa volonté… J’en ai déjà trop écrit…

Dimanche 11 mai
Soulagement : après des critiques parfois très vives de trois membres sur quatre du jury, contrebalancées par une défense magistrale de Robert Galisson, Shue devient docteur de l'Université Sorbonne nouvelle avec la mention très honorable.
Retrouvailles très affectives de Sally et mon papa qui ne s’étaient pas revus depuis vingt ans. Du travail éditorial de qualité exceptionnelle pour la maison d’édition de Sally : la dernière réédition, une œuvre gigantesque (par la taille, le poids et le contenu) d’Alphand sur les jardins de Paris, est saluée comme une exhumation très réussie.
Dernière crasse du magistrat foldingue, ersatz du procureur d’Amiens : en janvier, alors que Hermione et Angel se retrouvent au poste de police après un contrôle qui a dégénéré, le compagnon de Hermione est placé en garde à vue pour un prétendu délit de fuite. En réalité, l’un des flics s’est acharné sur l’essuie-glace arrière du véhicule comme premier contact, ce qui s’est soldé, après un échange verbal vif, par un départ un peu rapide du jeune homme. L’occasion était trop belle pour défouler ses frustrations : prise en chasse, sortie violente du véhicule, passage des menottes et placement au trou. Là où la crapule magistrate intervient, après avoir été contacté pour se porter garant de l’intégrité d’Angel, ni trafiquant, ni criminel, ni délinquant, c’est pour appuyer la garde à vue ! Le beauf ne trouve rien de plus légitime que d’enfoncer le compagnon de sa sœur… Qu’il le bouffe jusqu’au trognon son droit tordu. Confirmation, en tout cas, qu’il entretient sa répugnante nature d’écoeurement vivant.
Pour revenir à de plus humaines et nobles âmes, la soutenance de Shue m’a permis, lors du pot qui a suivi, de dialoguer avec son directeur de thèse, vieil homme longiligne, plein d’éloges (comme les autres membres du jury) à l’égard de mon aide littéraire que Shue n’a pas cachée. Comme un soutien indirect à ma propre amorce de thèse en stagnation...
Le soir, dans l’appartement de la tante L., avec deux couples d’amis, échanges divers dans un plurilinguisme qui entremêle farsi, anglais et français. Deux fois sur trois, je me laisse bercer par les sons de ma langue musicale préférée et des consonances du farsi, beaucoup plus doux que l’arabe, la prononciation ne systématisant pas les espèces de raclements de gorge. A la fin, sujet à se faire peur : la présence, dans la salle Bourgeac, d’un barbu, étudiant aux
allures islamistes et multipliant les questions indiscrètes auprès de Shue, de John et des perses présents. Certains passages de la thèse n’ont rien de l’encensement du régime actuel : de là à voir dans cette présence suspecte un missi dominici de l’Etat religieux pour de plus ou moins avouables intentions, les hôtes du soir s’y sont ingéniés, avec parfois une certaine jubilation. Au final, j’ai senti Shue peu rassurée...
Une courte villégiature à Deauville jusqu'à lundi soir, au somptueux hôtel Normandy, devrait apaiser les angoisses. A mon départ de l’appartement, je trouve une grande boîte de chocolats et un joli plumier. Gâté, trop gâté depuis vendredi, je leur laisse un mot de remerciements et une photo noire et blanc d’Himiko dont ils avaient apprécié l’esthétisme. Des amis très chers à mon cœur qui se confirment dans leur extrême gentillesse.

Lundi 12 mai
Retour au bercail lyonnais, tympans imbibés par les envolées lyrico-musicales de Coldplay.
Quatorze années d’amitiés avec Sonia et rien ne semble pouvoir l’affadir. Découverte, hier soir, du magnifique résultat de mois d’efforts, de courage et de combats avec le voisinage : un appartement rue Tournefort aux lignes multiples (sous les toits), aux tomettes et poutres rénovées, à l’espace chaleureux. Nid de 70m2 idéal pour cette chère avocate : n’y manque plus que le complice masculin à la bonne dimension physique et psychologique.
Cœur de notre entrevue dans un confortable restaurant japonais : une renaissance sentimentale après des années d’hibernation charnelle et de léthargie relationnelle. A voir ses amies se mettre en ménage, programmer des naissances de bambins, elle perd espoir. Sans volonté destructrice, elle n’entrevoit pas l’amorce d’un renouveau du contact. Je lui révèle, à sa grande surprise, mes pratiques passées du minitel, puis d’Internet, pour créer les liens ouvrant sur toute la palette de la complicité humaine : depuis le grand amour (Sandre) jusqu’à l’entremêlement sexuel éphémère en passant par l’amitié durable (Sophie B). Cette voie abolit la contrainte de l’abordage réel, souvent incongru, dans une rue, un café, un musée. Les présents sur ces sites sont là pour aborder et se laisser contacter sous couvert d’un anonymat sécurisant.
Dans un petit mot très gentil laissé ce matin, elle m’indique qu’elle y réfléchira. Espérons que la résurrection de la demoiselle s’accomplisse.
Avant mon départ, déjeuner partagé avec Isabelle T, autre exemple d’amante, convertie à l’amitié, rencontrée via XYZ sur minitel en 94 (probablement). Sa situation sentimentale ne connaît pas non plus de saillance probante. L’instant
partagé au bar douillet du Train bleu nous permet un panorama de notre actualité réciproque.
Très agréable promenade dans le parc meurtri du château de Versailles avec la troupe familiale paternelle, Jim et Aurélia. Redécouverte de ce lieu imposant et historiquement incontournable.
Enfin, ma BB qui m’attendra à la sortie du train pour des baisers de tendres retrouvailles après un week-end de labeur nocturne.
Léautaud doit redevenir ma focalisation littéraire pour ces mois estivaux. Alors pas de prolongations inutiles sur ce Clairefontaine velouté !

Mardi 13 mai, 0h…
Les fonctionnaires, si chevillés à leurs avantages, même au détriment de l’intérêt national, vont paralyser une partie du pays pour cette journée de grève. Mes pieds, eux, me conduiront normalement à P, pour 13h.
Le courage politique de la réforme vitale se trouve encore une fois confronté aux privilèges de secteurs, aux niches professionnelles incapables de sacrifices pour sauver le système. Seule la préservation de leurs satanés acquis compte…
Après Delon, Fogiel reçoit Bardot. Sa malhonnêteté le conduit à réaliser toute son émission dans la guimauve, pour exploiter au maximum le filon, puis, pour le dernier quart d’heure, à saborder le mythe en citant les virulences pamphlétaires du dernier ouvrage de Bardot. S’il connaissait un tant soit peu l’éthique, et quoi qu’on puisse penser des positions de BB, il aurait dû commencer par ce qui fâche, au risque de ne pouvoir faire l’émission suite au refus de Bardot. Non, il attend la fin et récolte ainsi le double apport : une émission complète et une fin détonante. Une salauderie opportuniste, en somme.

Samedi 17 mai
La grisaille basse derrière les stores et le bruit de fond des voitures filant sur l’asphalte trempé m’incitent, couchée près de ma BB, à poursuivre ce rendez-vous littéraire pour le moins nombriliste.
Reçu un long mail de Sonia, me remerciant de cette si longue amitié, de la confiance qu’elle a engendrée lui permettant de se confier sans retenue. Je la crois au début d’une « nouvelle vie », comme dirait Jonasz que j’écoute en fond avec Daho et Bashung, le sentimental régénéré.
Wallibi à l’eau pour ce jour, le dimanche devrait nous conduire, avec le duo Elo et Ivan (Shaïna trop épuisée pour nous accompagner), aux jeux d’eau.
Mai voit germer les grèves plus ou moins légales et légitimes : les fonctionnaires, en tête de proue, revendiquent le maintien de leurs avantages divers pour la retraite, malgré les faits démographiques incontestables. Ces simagrées sociales n’inclinent pas à redorer l’image des employés de l’Etat. Cet esprit à œillères désespère et n’incite pas à rallier le corps enseignant du public.
Thalassa dénonçait, hier soir, le « littoral assassiné », un puissant révélateur de la petite pourriture qui gangrène la beauté d’être et ne laissera jamais subsister une voie plus noble pour l’humanité, celle qui détacherait l’individu de sa jouissance au détriment de l’intérêt général et de son inclination grégaire pour animer ses planques occupationnelles.
23h30. La nébuleuse Al Qaida commet-elle sa première erreur stratégique ou est-ce le début d’une palestinisation du Proche Orient, et peut-être d’autres régions du monde ? En une semaine, deux séries d’attentats dans deux Etats arabes occasionnant des pertes civiles côté autochtones. L’Arabie saoudite et le Maroc ont certes été désignés par Ben Laden comme faisant partie des nations apostates à combattre, mais en étendant la terreur terroriste aux pays arabes, et en visant à l’aveugle des musulmans présents sur les lieux des explosions kamikazes, les groupements et groupuscules se revendiquant ben ladénistes vont perdre les importants soutiens (plus ou moins implicites) des populations arabo-musulmanes, jusque dans les contrées occidentales. La radicalisation des offensives va-t-elle marginaliser ce mouvement jusqu’à raréfier ses adhésions nouvelles ou intensifier les recrutements au regard de l’efficacité médiatico-mortifère des attaques clandestines ?

Dimanche 18 mai
10h10. Attente de ma BB, alors que les nuages matinaux se dissipent, pour notre départ vers Walibi où nous retrouverons les joyeux Elo et Ivan. Une journée festive pour marquer l’amorce d’une saison estivale bien remplie et diversifiée pour nous.
Se distraire pour oublier une parenthèse de temps la folie meurtrière de notre bien misérable espèce humaine. La guerre des Cent ans israélo-palestinienne vient encore de faucher quelques vies. Rien, jamais, ne justifiera que le sang coule et que les vies soient sacrifiées. Tant que ce paramètre de hiérarchisation éthique ne prévaudra pas, on ne pourra entrevoir un quelconque progrès de civilisation. Fric et religion : les voies du pire pour le pouvoir procuré.

Dimanche 25 mai, vers 1h30
Une semaine sans écrire, voilà qui devient rare ! Seul dans mon dodo, alors que ma BB trime, je profite de cette veillée tardive après quelques inconsistances échangées sur le tchat.
Plus efficace que l’évanescente Al Quaida, plus démonstrative que l’armada américaine, dame Nature a grimpé l’échelle de Richter pour créer le chaos et plusieurs milliers de victimes, mortes ou blessées. L’Algérie, tout comme la Turquie quelques années plus tôt, panse ses plaies dans la désorganisation étatique et la carence des moyens de secours. En outre, des promoteurs immobiliers ont été les complices du tremblement en lui offrant des immeubles fragilisés par les économies faites sur leur construction.

Lundi 26 mai, vers 0h30
Ma tendre toujours sur la brèche alors que j’essaye de me croire inspiré à l’horizontal. Pas très turgide le gars, à première vue. Ne pas s’acharner et revenir à une démarche plus simple et plus saine…
Juin approche et rien n’annonce la publication du Gâchis… j’aurais mieux fait de conserver l’info pour moi tant que l’ouvrage n’était pas effectivement sorti. A trop étaler des perspectives irréalisées, je dois apparaître un peu léger ou incapable d’obtenir les choses promises.
Là, c’est vrai, je n’irai jamais réclamer quoi que ce soit à Heïm. Plus aucune relation d’attente. Je demeure juste attentif à la réalisation d’une promesse vieille de presque trois ans. Que cela aboutisse ne serait que normalité ; si cela rejoignait les oubliettes, je me conforterais dans la défiance pour cet univers.
Rabâcher, un peu limité comme inspiration.
Petite semaine professionnelle avant un séjour avec BB, Jim et Aurélia à Fontès. Cette visite de mon frère et de sa dulcinée m’enchante. J’aurais le temps de leur révéler les charmes de Lyon avant la route vers la Provence et grand-mère dans sa quatre-vingt onzième année.
Il faudra que je demande à Jim comment il a ressenti les retrouvailles avec Sally.
Fréquence Jazz diffuse quelques douceurs mélodiques, mais cela ne suffit pas pour attiser la bonne veine littéraire. L’impression d’un noircissement machinal s’exacerbe un peu plus les lignes passant. Mais quoi, alors ? Abandonner ce griffonnage pour une nuit à ellipses ? Soit. Revenir pour de plus pressantes occasions.
23h50. Les parallèles de l’actualité dans le sordide domaine des catastrophes naturelles, mais totalement dénuées de charme, soulignent l’inégalité cruelle des pays pauvres ou riches. L’Algérie aligne plus de onze mille victimes (décédées ou blessées) alors que le Japon ne déplore, pour un tremblement à l’intensité légèrement supérieure, que soixante-douze blessés. Le je m’en foutisme immobilier d’un côté, le sérieux et l’effectivité des normes antisismiques dans le bâtiment de l’autre. (N’oublions pas, cependant, les six mille morts de Kobé qui relativisent l’efficacité de ces efforts face aux déchaînements des plaques.) Et lorsqu’à cette injustice, somme toute humaine, s’ajoutent des facteurs physiques et géologiques pour expliquer la différence de portée de ces deux frottements cataclysmiques, le contraste entre les deux régions du monde en devient d’autant plus cynique. Malheureuse Algérie, victime des hommes et de la nature… à moins d’y voir une sentence divine…

Jeudi 29 mai, 0h30
Face aux braillards inconséquents de la rue, je trouve un certain panache au Raffarin. Passé chez notre institution journalistique, l’inaltérable Poivre d’Arvor, le Premier ministre a communiqué très limpidement, sans pathos excessif, sans technocratisme rébarbatif, mais en remettant les réformes vitales proposées en perspective : une réforme des retraites, étalées sur dix-sept ans, ne peut s’assimiler à un coup de massue ou de poignard comme le beuglent les fonctionnaires grévistes. A ne revendiquer que pour la sauvegarde de leurs illégitimes privilèges et faire accroire qu’ils se battent aussi pour le secteur privé, les employés à vie confirment la pesanteur pachydermique du système public. Le corps enseignant du public abonde dans cette sale manie de rejeter tout changement au nom d’un ensemble disparate dont le socle commun fantasme dans des interprétations abusives des intentions du gouvernement. Les mises au point ont donc été faites, ce qui ne calmera pas les excités sociaux.

Samedi 31 mai, 22h50
Séjour à Fontès très largement entamé en double couple harmonieux. Le climat estival sans les estivants rend le golfe du Lion quasi paradisiaque. Nous prélassons nos chairs diversement teintées sous les rayons régénérants. Entre la plage, les promenades à nuitée, le tennis en défoulement, les passages à la Providence pour embrasser grand-mère :

le planning catapulte aux oubliettes temporaires les monomanies de la vie urbaine.
Premier bouleversement purgatif : une déconnexion totale de l’actualité mâchée par Big Media, plus rien du tintouin régurgité. Le silence du monde lointain, hors de portée, fantasmagorique, recentre sur l’essentiel local qui nous accroche sans intermédiaire. Se forger son événementiel, tout dérisoire soit-il, libère l’esprit du nivellement collectif.
En dehors de ces vagues et très illusoires changements, je retrouve l’atmosphère du village avec ses têtes vieillissantes, ses agrandissements immobiliers face aux inaltérables demeures d’un autre temps. Lors de notre première promenade, passage au cimetière dans ses parties antiques et nouvelles. Je découvre à côté du caveau B., dans lequel repose grand-père, celui des H. qui, en 2002, a accueilli l’ancien maire de la commune, André, qui eut grand-père comme premier adjoint. Proches dans la vie et rapprochés pour l’éternité.

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